Gamification de la santé et Serious game

gamification de la santé et serious game

L’importance culturelle des jeux : de l’homo ludens à la gamification

Le sujet des « jeux » peut sembler exotique, à la limite de la fantaisie. On pense tous aux jeux de société, aux jeux vidéo, aux jeux de réflexion, aux jeux d’eau, etc. Bref, tout ce qui nous ramène à notre enfance ou à notre temps libre, rien qui mérite le titre « essai sérieux ». Cependant, les jeux sont avant tout « culturels ». L’historien Johan Huizinga va même jusqu’à suggérer que « les jeux sont plus anciens que la culture » dans son livre The Game Players: An Essay on the Social Function of Games.

Les animaux ne jouent-ils pas sans s’organiser en sociétés ? Les humains seraient ainsi homo sapiens (ceux qui savent), homo faber (ceux qui fabriquent), mais aussi homo ludens (ceux qui jouent). Le jeu est vieux de plusieurs siècles, c’est donc une question qui ne peut être mise de côté. Ce constat s’est encore confirmé avec le développement des technologies de l’information et de la communication. Une nouvelle science a bel et bien le bout de son nez avec le jargon 2.0 : la « gamification ».

La gamification : appliquer les mécanismes du jeu pour encourager les comportements souhaités

Le mot anglais « gamification » aurait été introduit pour la première fois en 2007. Maintenant c’est traduit en français « ludification« , qui n’est pas un équivalent exact (fun ne veut pas forcément dire jeu), et on y renonce volontairement. S’il y a presque autant de définitions que d’auteurs, la gamification peut tout de même être limitée comme suit :

« Appliquer des mécanismes spécifiques au jeu (en particulier au jeu vidéo) à diverses disciplines telles que la publicité, le marketing ou l’éducation pour encourager les utilisateurs à adopter les comportements souhaités de manière ludique. »

Les grands programmes de fidélité (points échangeables, coupons de réduction, etc.) ou les jeux éducatifs (coloriage, imitation, etc.) dans les établissements d’enseignement font partie de l’inscription quotidienne à la gamification. L’auteure américaine Amy Jo Kim articule notamment l’approche consumériste, identifiant cinq aspects importants de la « gamification » de l’intelligence.

  • Défi. Les joueurs doivent gagner ou marquer avec le moins de difficulté ; « conquête sans danger, victoire sans gloire ».
  • Collection. Les joueurs doivent accumuler un critère (points, badges, objets) pour éventuellement obtenir un statut particulier.
  • Echanger. Le joueur doit pouvoir échanger ce qu’il gagne contre une contrepartie (matérielle ou immatérielle).
  • Rétroaction. Le joueur doit être capable d’interagir avec les autres participants, gagnant des « récompenses » pour ses actions.
  • Personnaliser. Les joueurs méritent des récompenses adaptées à leurs besoins et à leurs désirs.

Les jeux sérieux, une méthode de formation prometteuse dans le secteur de la santé.

La gamification a également gagné le secteur de la santé, devenant une tendance observée de près par le personnel médical et les patients ces dernières années.

Le serious gaming (terme légèrement différent de la gamification) est une nouvelle méthode de formation pour les professionnels de santé. Des jeux interactifs permettent de s’entraîner ou de se perfectionner tout en s’amusant.

Cette formule n’est pas nouvelle, et nous nous référerons au célèbre dicton d’Horace « placere et docere » (plaire et guider). Cependant, la technologie numérique semble avoir décuplé le potentiel du jeu. En tant que tel, le système Pulse a été l’un des premiers « jeux sérieux » aux États-Unis à immerger les infirmières et les médecins dans des situations de soins aux patients ; dans le but de mieux gérer leur temps, leur stress, leurs émotions, etc.

Nous avons également pensé au module français SimUrgences, destiné aux médecins urgentistes et cardiologues dans la prise en charge des urgences cardiaques, ou encore Florence, orienté vers la pratique infirmière. Il existe actuellement un certain nombre d’initiatives de ce type en cours de développement : Les jeux deviennent un outil de formation médicale.

Dans le second cas, la gamification est une manière ludique, innovante et divertissante d’impliquer les patients dans leur parcours de soins. En particulier, il peut être utilisé dans des contextes spécifiques d’éducation thérapeutique, de rééducation ou de suivi de pathologie.

En matière d’éducation au traitement, la plateforme Gluciweb vise à sensibiliser au diabète de type 1 à travers trois jeux destinés aux enfants, adolescents et jeunes adultes. En matière de rééducation, le projet MoJOS (Health Oriented Game Engine) est à la base du jeu Voracy Fish pour favoriser la rééducation fonctionnelle des membres supérieurs après un AVC.

Concernant le suivi pathologique, l’initiative Az@game vise à mesurer l’évolution de la maladie d’Alzheimer, par exemple à travers des jeux de guerre navale. Plusieurs applications sont développées simultanément visant à stimuler l’activité physique ou à contrôler l’alimentation d’une personne.

Le serious game, une solution viable

Le jeu doit être pris au sérieux, car il offre un potentiel réel pour l’éducation, la prévention, le suivi et le traitement dans le domaine de la santé. Cependant, il est important de ne pas être naïf ou infantilisant, car la gamification en santé présente également des risques techniques, juridiques et éthiques. Ce blog est donc une incitation à réfléchir sérieusement à la place et au rôle que nous souhaitons donner au jeu dans le domaine de la santé. Nous devons déconstruire le mythe du jeu comme « traitement de jouvence » imparable et construire une véritable réflexion à ce sujet.

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